Un Apollon
transformé en Phaëton, un soleil transfiguré en force apocalyptique, un
souverain magnanime dépeint sous les traits du tyran, une gloire royale résumée
à un coq déplumé, tel fut le sort réservé à Louis XIV au-delà des frontières
françaises. Celui qui confessait à son fils que « les peuples […] se
plaisent aux spectacles. Par là nous tenons leurs esprits et leurs cœurs »
put, de son vivant, assister au développement d’une contre-image qui visait à démonter les
ressorts de la propagande royale et lever le voile sur ses intentions réelles :
la libido dominendi.
Isaure Boitel
a rassemblé un corpus iconographique aussi unique que divers : 331 pièces
satiriques composées de gravures peu connues, de médailles, de jetons de Tric Trac,
de cartes à jouer et même d’un plat à barbe. Grâce à une édition de qualité et
un commentaire très fin des œuvres, c’est une autre histoire du Grand Siècle
qui est écrite ici : celle de la haine de la France éprouvée par les
Anglais ou les Hollandais notamment. À
partir des années 1668 et les premières attaques contre les Pays-Bas
méridionaux, les satires vinrent flétrir ce dont Louis XIV était le plus
fier : sa gloire militaire.
La guerre de
Hollande (1672-1678) et surtout la Révocation de l’édit de Nantes (1685)
radicalisèrent la rhétorique visuelle dont l’analyse reste complexe. À la suite
de Michael Baxandall, ces documents sont heureusement appréhendés dans leur
matérialité, leur contenu et leur action sur les événements et l’opinion
publique. L’auteur montre bien que ces représentations participaient pleinement
de la culture européenne des images au même titre que les productions des
grands artistes. Au-delà de la critique de Louis XIV, c’est donc la
compréhension des imaginaires politiques européens qui guide un ouvrage justement
attendu.
Référence : Isaure Boitel, L’image
noire de Louis XIV, Provinces-Unies , Angleterre (1668-1715), Ceyzérieu,
Champ Vallon, 2016.
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